Soudan

Comprendre la Guerre au Soudan : Lutte de Pouvoir, Coup d’État et Intérêts Géo-stratégiques

Entre ambitions militaires et enjeux internationaux, la guerre au Soudan révèle un conflit bien plus complexe qu’il n’y paraît.

La guerre qui ravage actuellement le Soudan ne peut être réduite à une simple quête de liberté. Derrière les affrontements sanglants entre l’armée régulière et les Forces de Soutien Rapide (RSF), se cachent des jeux de pouvoir, des intérêts économiques, et des influences internationales majeures. Pour comprendre cette crise, il faut plonger dans les racines historiques et politiques du conflit.


Un pays en crise : Aux origines du chaos

Le Soudan traverse une période noire. Les combats, particulièrement violents à Khartoum, opposent l’armée nationale à un groupe paramilitaire : les Forces de Soutien Rapide (RSF). Plus de 200 morts sont déjà recensés. Pourtant, ces deux forces étaient autrefois alliées : ensemble, elles avaient renversé le pouvoir en 2021.

La fracture s’est creusée au moment de discuter de l’intégration des RSF dans l’armée. La question cruciale : qui contrôlerait les forces armées ? C’est le début de l’affrontement.


Deux figures militaires au sommet : Al-Bouran vs Dagalo

À la tête de l’armée soudanaise, le général Al-Bouran, militaire de carrière ayant gravi les échelons sous Omar el-Béchir. En face, le général Mohamed Hamdan Dagalo, chef des RSF, un groupe né des milices Janjawid tristement célèbres pour leur brutalité au Darfour dans les années 2000.

Dagalo, enrichi sous le régime Béchir grâce à des activités commerciales (mines d’or, élevage, infrastructures), a peu à peu gagné en puissance. Mais en 2019, retournement : les RSF participent à un coup d’État contre Béchir, leur ancien allié.


Une transition démocratique avortée

Après ce coup d’État, un conseil militaire-civil de transition est mis en place, incluant l’armée, les RSF, et des civils pro-démocratie. Mais en octobre 2021, nouveau rebondissement : l’armée et les RSF s’unissent à nouveau pour évincer les civils et s’accaparer le pouvoir. Résultat : des manifestations massives éclatent dans tout le pays, réclamant un retour à la démocratie.

La fracture s’élargit ensuite entre les RSF et l’armée, à propos de leur fusion dans une armée unique. L’enjeu devient clair : qui dirigera cette armée unifiée ? Le pouvoir est au cœur du conflit.


La géopolitique s’en mêle : la Russie entre en jeu

Autre dimension cruciale du conflit : l’ingérence internationale. En 2019, un accord est signé (mais révélé seulement en 2021) entre le Soudan et la Russie, pour permettre à cette dernière de construire une base navale sur les côtes soudanaises. En échange, Moscou fournirait des armes et soutien militaire, notamment contre les embargos.

Mais depuis, l’absence de parlement rend l’accord difficile à ratifier, et les coups d’État successifs ont brouillé les cartes. Cet accord avec la Russie a déclenché l’inquiétude de puissances occidentales, car il donnerait à Moscou un accès stratégique à la mer Rouge.


Le vrai visage de la guerre : pouvoir ou liberté ?

Le conflit soudanais met en lumière une réalité douloureuse : le combat n’est pas toujours pour la liberté, mais bien souvent pour le pouvoir et la richesse. Derrière les discours sur la démocratie, ce sont les positions de commandement, les intérêts économiques, et les alliances internationales qui motivent les actions des dirigeants.

La population civile, elle, reste la première victime. Exaspérée par des décennies de dictatures, de répressions, de manipulations et de conflits, elle lutte pour une véritable souveraineté, alors que les élites militaires se battent pour conserver ou étendre leur emprise.


Une transition impossible sans parlement

L’absence d’un parlement fonctionnel depuis 2019 empêche toute validation officielle des accords, notamment avec la Russie. Ce vide institutionnel est utilisé comme prétexte pour maintenir le chaos et empêcher toute stabilisation du pays. Les puissances occidentales, qui préféreraient un pouvoir civil démocratiquement élu, voient d’un mauvais œil un régime militaire soutenant la Russie.

Le risque est grand : tant que le pouvoir reste concentré entre les mains de chefs militaires rivaux, le pays ne connaîtra ni paix durable, ni reconstruction stable.

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Conclusion : Quelle issue pour le Soudan ?

Le Soudan est aujourd’hui à la croisée des chemins. Entre intérêts militaires, ambitions personnelles, et enjeux géopolitiques, le peuple soudanais est pris au piège. Ce conflit illustre une tendance tragique : la lutte pour la liberté est souvent détournée par ceux qui veulent conserver le pouvoir.

Une solution durable ne pourra émerger que lorsque le pouvoir sera véritablement remis au peuple, et que les influences étrangères ne seront plus instrumentalisées à des fins internes. Reste à savoir si les acteurs actuels sont prêts à faire ce sacrifice.

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Plongez-vous dans un univers captivant où chaque texte est une fenêtre ouverte sur des sujets variés, allant de la géopolitique africaine aux questions de vie et de la société africaines et autres. Zack Mwekassa: Le Guérier Noir, Votre Frère.

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