Etats-Unis

Pourquoi les États-Unis veulent isoler l’Afrique du Sud : la fin d’une alliance stratégique ?

L’expulsion d’étudiants militaires sud-africains et la suspension de l’aide américaine révèlent une crise diplomatique profonde entre Washington et Pretoria.

Depuis quelques semaines, les tensions montent entre les États-Unis et l’Afrique du Sud. En cause : des divergences politiques, l’attitude de Pretoria sur la scène internationale, et un bras de fer autour de la Cour pénale internationale. Washington a répondu par une série de sanctions : expulsion d’étudiants militaires, gel de la coopération sécuritaire, menace d’exclusion d’AGOA. Ce qui se joue ici dépasse le simple désaccord diplomatique : c’est la redéfinition des rapports de force entre une puissance mondiale et un pays africain en quête de souveraineté.


Rupture diplomatique : des sanctions américaines sans précédent

Tout commence avec une série de mesures punitives prises par Washington contre Pretoria. Les États-Unis ont suspendu plusieurs programmes de coopération militaire, notamment :

      • L’éducation et la formation militaire internationale
      • Le financement militaire étranger
      • Les ventes d’équipements militaires

Pire encore, les étudiants militaires sud-africains en formation aux États-Unis ont été renvoyés chez eux, coupant court à des années de partenariat. Cette décision intervient peu après l’expulsion de l’attaché militaire sud-africain aux États-Unis, à la suite de propos jugés critiques envers Donald Trump.


Une rancune politique mal dissimulée

Officiellement, les sanctions sont liées à une accumulation de décisions jugées « hostiles » par Washington : la coopération militaire de l’Afrique du Sud avec la Chine, l’utilisation par des pilotes chinois d’avions de combat américains, ou encore la posture de Pretoria sur la scène internationale, notamment à l’égard de pays sous tension géopolitique.

Mais en filigrane, une autre raison plus profonde semble émerger : la plainte de l’Afrique du Sud contre un pays proche de Washington à la Cour pénale internationale (CPI). En refusant de se rétracter, Pretoria s’est attiré les foudres de l’administration américaine.


AGOA : l’arme économique des États-Unis contre leurs partenaires africains

L’un des leviers les plus redoutés dans ce bras de fer est la menace d’exclusion de l’Afrique du Sud de l’accord AGOA (African Growth and Opportunity Act). Cet accord permet à certains pays africains d’exporter vers les États-Unis sans droits de douane, notamment :

      • Des véhicules produits localement, dont les célèbres Mercedes de East London
      • Des vêtements et textiles sud-africains
      • Des ressources minières, des produits agricoles (agrumes, vin, noix) et des biens transformés

Une exclusion d’AGOA serait un coup dur pour l’économie sud-africaine, fortement dépendante de ses exportations vers le marché américain. Ce chantage économique soulève une question essentielle : à quel prix préserver une relation avec Washington ?


L’enjeu : céder ou résister ?

Le gouvernement sud-africain se retrouve dans une position délicate. D’un côté, le respect de sa souveraineté, de l’autre, le risque de perdre des avantages économiques cruciaux. Pour certains, céder aux exigences américaines reviendrait à renier ses principes. Pour d’autres, il s’agit simplement de réalisme politique.

La question de la CPI cristallise ce débat : doit-on sacrifier une position morale et juridique pour préserver une relation commerciale ? Ou faut-il tenir tête à une superpuissance au nom de la dignité nationale ?


Le précédent du Zimbabwe : une mise en garde

L’histoire africaine récente offre un avertissement clair. Au début des années 2000, le président Robert Mugabe au Zimbabwe avait exproprié les terres détenues par la minorité blanche sans compensation. La réaction occidentale fut immédiate : sanctions économiques, isolement diplomatique, effondrement économique.

Aujourd’hui, l’Afrique du Sud, qui détient toujours une inégalité foncière criante (72 % des terres contrôlées par une minorité blanche), tente une redistribution plus douce. Mais Washington craint un scénario à la Mugabe, et justifie ses sanctions sous couvert de « prévention ».


L’Afrique du Sud peut-elle se passer des États-Unis ?

La réponse n’est pas si simple. Les investissements américains en Afrique du Sud sont colossaux : Ford, Amazon, Coca-Cola, Visa, IBM… Ces entreprises créent des milliers d’emplois. Menacer leur retrait, c’est mettre en péril une part significative de l’économie locale.

Mais dans un monde multipolaire, l’Afrique du Sud peut aussi diversifier ses partenariats : la Chine, la Russie, le Brésil ou même certains pays africains offrent des alternatives. Le renforcement des coopérations sud-sud pourrait être la clé d’une indépendance géopolitique nouvelle.


Le choix moral : trahir ou rester fidèle à ses principes ?

La vidéo pose une métaphore forte : celle de l’ami que l’on soutient dans un procès contre une entreprise injuste. Serez-vous celui qui trahit son ami pour préserver son emploi, ou celui qui reste fidèle, quoi qu’il en coûte ?

L’Afrique du Sud doit faire face à cette même question. Doit-elle retirer sa plainte à la CPI pour retrouver les faveurs de Washington ? Ou doit-elle maintenir sa position, même au risque d’un isolement économique ? C’est l’épreuve de vérité d’une nation qui veut exister sans plier le genou.

A Lire: TRUMP MENACE L’AFRIQUE DU SUD : UNE ESCALADE DIPLOMATIQUE INQUIÉTANTE ?


Conclusion : un tournant décisif pour l’Afrique du Sud

La détérioration des relations entre l’Afrique du Sud et les États-Unis marque peut-être le début d’un réalignement stratégique en Afrique. Pretoria, en affirmant ses positions, ouvre une voie difficile, mais potentiellement porteuse d’un nouveau rapport de force mondial.

Ce bras de fer est aussi un message pour les autres nations africaines : revendiquer sa souveraineté a un prix. Reste à savoir si ce prix est tenable. Mais une chose est sûre : l’Afrique du Sud, en refusant de courber l’échine, redéfinit ce que signifie être un État africain libre au XXIe siècle.

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Plongez-vous dans un univers captivant où chaque texte est une fenêtre ouverte sur des sujets variés, allant de la géopolitique africaine aux questions de vie et de la société africaines et autres. Zack Mwekassa: Le Guérier Noir, Votre Frère.

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