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Ibrahim Traoré à Air France : Pas de retour sans excuses officielles et changement du statut sécuritaire du Burkina Faso

Le président burkinabè conditionne la reprise des vols d’Air France à une reconnaissance diplomatique explicite que le pays n’est plus en « zone rouge ».

Depuis la suspension des vols d’Air France vers le Burkina Faso en août 2023, la tension diplomatique ne cesse de croître. Le président Ibrahim Traoré refuse toute reprise sans un acte officiel de reconnaissance du retour à la normale. En exigeant que la France rectifie publiquement son classement sécuritaire, le Burkina Faso affirme son exigence de respect et de souveraineté nationale. Une posture inédite dans les relations franco-africaines.


Un conflit diplomatique autour du statut sécuritaire

En août 2023, la France a classé le Burkina Faso en zone rouge, déconseillant tout voyage vers le pays en raison de l’insécurité. Dans la foulée, Air France a suspendu ses vols vers Ouagadougou, interrompant brutalement ses liaisons avec le pays. Mais depuis, plusieurs autres compagnies comme Turkish Airlines, Ethiopian Airlines ou Brussels Airlines ont continué à desservir le pays, remettant en question la légitimité de cette mesure unilatérale.

Pour le président de la transition Ibrahim Traoré, la situation sécuritaire ne justifie plus un tel statut. Il refuse catégoriquement toute reprise des vols d’Air France tant que la France ne révise pas officiellement son classement du Burkina Faso, passant de la zone rouge à la zone verte.

« Si c’est devenu vert, vous devez l’écrire ! » a-t-il insisté avec fermeté.


Une exigence de respect diplomatique : « Pas de pardon tacite »

Pour Traoré, cette affaire dépasse largement la simple logistique aérienne. Elle touche à la dignité du pays. Le président a comparé cette situation à un conflit entre proches où les excuses implicites ne suffisent pas : un cadeau, une invitation ou un geste ne remplace pas un véritable pardon exprimé verbalement.

De la même manière, la France ne peut pas reprendre ses vols au Burkina Faso sans reconnaître publiquement que sa perception du pays était erronée ou exagérée. Cela revient à exiger des excuses diplomatiques indirectes, à travers une révision du statut sécuritaire.

« On ne revient pas comme si de rien n’était. Il faut dire ‘je suis désolé, j’ai mal jugé la situation’. »


Air France perd 65 millions de dollars, mais la France donne 400 millions ?

Un élément marquant du discours d’Ibrahim Traoré est la contradiction apparente entre les aides financières françaises et les intérêts économiques en jeu. Il rappelle que la France affirme avoir perdu 65 millions de dollars depuis la suspension des vols, alors qu’elle verse plus de 400 millions de dollars sous forme d’aides au développement au Burkina Faso, au Mali et au Niger.

Une logique qu’il remet en question :

« On ne donne pas 400 millions de dollars juste pour perdre 65. Il y a forcément des intérêts cachés. »

Il soulève ainsi le débat sur la réalité des échanges France-Afrique, où l’aide n’est pas toujours désintéressée. Le président interpelle ses concitoyens sur les dessous économiques et stratégiques des relations internationales, dénonçant une forme de double discours occidental.


Une ligne rouge ferme : le respect ou rien

La posture d’Ibrahim Traoré est limpide : tant que le Burkina Faso reste classé en zone rouge par la diplomatie française, aucun avion d’Air France ne survolera le ciel burkinabè. Cette fermeté est symbolique : le pays ne veut plus être traité comme un territoire instable sans mot à dire. En refusant de se plier aux logiques occidentales, le Burkina Faso affirme sa souveraineté.

Le président dénonce également le jeu des perceptions, où l’image d’un pays instable est parfois fabriquée et entretenue à des fins géopolitiques. Le fait que d’autres compagnies internationales continuent d’opérer prouve, selon lui, l’incohérence du classement français.


Un précédent qui pourrait faire école

Ce bras de fer entre le Burkina Faso et Air France pourrait bien créer un précédent en Afrique. Pour la première fois, un État africain subordonne un partenariat avec une grande entreprise occidentale à une reconnaissance de sa stabilité interne, exigeant respect et transparence.

Ce n’est pas simplement une question de vols commerciaux. C’est une affirmation d’indépendance politique et d’autonomie décisionnelle. Cette dynamique s’inscrit dans une tendance plus large, où plusieurs pays africains cherchent à redéfinir leurs relations avec les anciennes puissances coloniales, notamment la France.


Une diplomatie fondée sur la vérité et la cohérence

À travers cet affrontement diplomatique, le président burkinabè envoie un message clair : on ne peut pas traiter un pays comme une zone de guerre d’un côté, puis vouloir y faire du commerce de l’autre. Le Burkina Faso exige une diplomatie cohérente, fondée sur des faits réels, et non sur des intérêts masqués.

Cette posture renforce également la confiance nationale, car elle montre que les autorités ne sont pas prêtes à accepter n’importe quoi au nom de l’aide ou des intérêts économiques. Elle suscite un regain de patriotisme et une volonté d’émancipation de l’influence étrangère.

A Lire: Ibrahim Traoré et la Révolution du Burkina Faso : Un Modèle pour l’Afrique ?


Conclusion : un appel à une nouvelle ère des relations Afrique-Europe

En conditionnant le retour d’Air France à un acte diplomatique clair, Ibrahim Traoré ne se contente pas d’un bras de fer commercial. Il appelle à un changement de paradigme dans les relations internationales entre l’Afrique et l’Europe. Une relation fondée non plus sur l’assistanat, la condescendance ou les intérêts flous, mais sur le respect mutuel, la reconnaissance et la transparence.

Ce type de leadership pourrait inspirer d’autres pays africains à exiger plus de clarté dans leurs partenariats internationaux. Car comme le dit Traoré : « Le respect, ça ne se négocie pas. »

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